Géométrie analytique et algèbre linéaire#

De nombreuses quantités dans notre monde physique, telles que la température d’un lieu donné ou son altitude, sont décrites par un seul nombre. Ces quantités sont dites scalaires.

Cependant, d’autres quantités nécessitent plus d’informations pour être modélisées : par exemple, pour décrire le flux d’air en un point, nous devons spécifier non seulement l’« intensité » ou la magnitude du flux, mais aussi sa direction.

Mathématiquement, une telle quantité est modélisée par un vecteur dans l’espace vectoriel espace vectoriel euclidien (généralement \(\mathbb{R}^2\) ou \(\mathbb{R}^3\)). Ces espaces vectoriels euclidiens seront l’objet principal de ce chapitre.

Nous commençons par un espace euclidien familier : le plan infini, un monde à deux dimensions. Notre première préoccupation est d’établir un système de coordonnées. Nous pouvons choisir une position arbitraire dans ce plan comme étant l’origine, à laquelle nous attribuons la coordonnée \((0,0)\). Les autres positions reçoivent alors des coordonnées dans \(\mathbb{R}^2\), mesurant intuitivement le déplacement « vertical » et « horizontal » par rapport à l’origine : c’est le système de coordonnées cartésiennes.

Il convient également d’établir une notion de distance : étant donné deux points arbitraires, quelle est la distance qui les sépare ? La réponse est donnée par l’application du théorème de Pythagore :

../_images/Euclidean_distance_2d.svg

Nous pouvons donc définir la distance euclidienne entre deux points \(p,q\) comme suit :

\[d(p,q) = \sqrt{(p_1-q_1)^2 + (p_2-q_2)^2}\]

Les quantités scalaires sont simplement des nombres réels attachés à chaque point \((x,y)\). Par exemple, nous pouvons imaginer faire fonctionner un radiateur à l’origine pendant quelques minutes, puis mesurer les températures \(T(x,y)\) dans l’espace : \(T(x,y)\).

../_images/heat.svg

D’autre part, des quantités telles que le flux d’air sont décrites par l’attribution d’un vecteur, un segment de ligne dirigée, à chaque point :

../_images/vectorField.svg

En se concentrant sur un seul point, prenons l’origine \((0,0)\) pour simplifier, nous pouvons considérer un certain nombre de vecteurs émanant de ce point :

../_images/vecsAtO.svg

Ces vecteurs sont complètement déterminés par les coordonnées de leurs extrémités, de sorte que nous pouvons écrire \(\vec{v} = (v_1,v_2)\) pour le vecteur dont les coordonnées sont \(x,y\).

Quelles sont les opérations possibles que nous pouvons appliquer à ces vecteurs ? Nous pouvons multiplier un vecteur par un scalaire (un élément de \(\mathbb{R}\)) :

(7)#\[a \cdot \vec{v} = a \cdot (v_1,v_2) = (av_1,av_2)\]

Géométriquement, cela correspond à étendre et à retourner les vecteurs :

../_images/vecsAtO2.svg

Essayez de modifier la valeur de \(a\) ci-dessous :

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Nous pouvons également additionner deux vecteurs \(\vec{v}=(v_1,v_2), \vec{u}=(u_1,u_2)\), en utilisant la règle du parallélogramme :

(8)#\[\vec{v} + \vec{u} = (v_1,v_2) + (u_1,u_2) = (v_1+u_1, v_2+u_2)\]

Géométriquement, la somme se présente comme suit :

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Espaces vectoriels euclidiens#

Rassembler tous les vecteurs possibles qui émanent d’un point dans un ensemble \(V\) équipé des opérations de multiplication scalaire et d’addition vectorielle donne la notion très importante d’un espace vectoriel.

Definition 1 (Espace vectoriel sur \(\mathbb{R}\))

Un espace vectoriel sur \(\mathbb{R}\) est un ensemble non vide \(V\) ainsi que deux opérations binaires

  • Multiplication par un scalaire: \(\cdot: \mathbb{R} \times V \rightarrow V\),

  • somme: \(+: \mathbb{V} \times \mathbb{V} \rightarrow V\),

qui remplissent les conditions suivantes:

  1. Pour tout \(\vec{u},\vec{v},\vec{w} \in V\): \(\vec{u}+(\vec{v}+\vec{w})=(\vec{u}+\vec{v})+\vec{w}\).

  2. Pour tout \(\vec{u},\vec{v} \in V\): \(\vec{u}+\vec{v}=\vec{v}+\vec{u}\).

  3. Il existe un élément \(\vec{0} \in V\) tel que pour tout \(v \in \mathbb{V}\), \(\vec{v} + \vec{0} = \vec{v}\).

  4. Pour tout \(\vec{v} \in V\), il existe un élément \(\vec{v'} \in \mathbb{V}\) tel que \(\vec{v} + \vec{v'} = 0\). On note généralement \(\vec{v'} = -\vec{v}\).

  5. Pour tout \(a,b \in \mathbb{R}\) et \(\vec{v} \in \mathbb{R}\): \(a(b\vec{v})=(ab)\vec{v}\).

  6. Pour tout \(\vec{v} \in V\): \(1\vec{v} = v\).

  7. Pour tout \(a \in \mathbb{R}\) et \(\vec{u},\vec{v} \in V\): \(a(\vec{u}+\vec{v})=a\vec{u} + a\vec{v}\).

  8. Pour tout \(a,b \in \mathbb{R}\) et \(\vec{v} \in V\): \((a+b)\vec{v}=a\vec{v} + b\vec{v}\).

Un résultat fondamental de l’algèbre linéaire est alors que chaque vecteur euclidien dans cet espace vectoriel peut être décomposé en une combinaison linéaire de multiplications scalaires et d’additions d’un nombre fixe de vecteurs : la base. En d’autres termes, il existe un ensemble \(B = \{\vec{i}, \vec{j}\}\) de vecteurs de base tel que chaque \(v \ dans V\) peut être écrit comme une somme de multiples scalaires d’éléments dans \(B\) :

(9)#\[\vec{v} = c_1 \vec{i} + c_2 \vec{j}\]

Nous listons généralement les coefficients de ces combinaisons linéaires en notation vectorielle :

(10)#\[\begin{split}\vec{v} = \begin{pmatrix} c_1 \\ c_2 \end{pmatrix}\end{split}\]

En effet, tout ce temps, nous avons utilisé (implicitement) la base standard de \(\mathbb{R}^2\) qui consiste en deux vecteurs de longueur \(1\) qui commencent à \(0\) et se terminent à \((1,0)\) et \((0,1)\). En notation vectorielle en colonnes, ces vecteurs sont \(\vec{i} = \begin{pmatrix}1 \\ 0 \end{pmatrix}\) et \(\vec{j} = \begin{pmatrix} 0 \\ 1 \end{pmatrix}\).

Équiper l’espace \(\mathbb{R}^2\) de tous les vecteurs réels (ou, de manière équivalente, de toutes les paires de coordonnées cartésiennes) de la structure d’un espace vectoriel sur \(\mathbb{R}\) n’est pas suffisant pour modéliser entièrement notre notion intuitive d’espace euclidien.

Ce qui manque, c’est un moyen de parler des notions de :

  1. La longueur (magnitude) d’un vecteur

  2. L’angle entre deux vecteurs.

Pour le premier point ci-dessus, nous pouvons considérer que la longueur d’un vecteur est la distance euclidienne de son extrémité à l’origine :

Definition 2 (Norme)

Soit \(V\) l’espace vectoriel standard défini par \(\mathbb{R}^2\) sur \(\mathbb{R}\). La longueur ou norme d’un vecteur \(\vec{u} = (u_1,u_2) \in V\) est alors définie comme étant :

\[ \lVert u \rVert = d(u_1,u_2) = \sqrt{u_{1}^2 + u_{2}^2} \]

En ce qui concerne le deuxième point ci-dessus, nous pouvons utiliser des techniques géométriques pour calculer l’angle entre deux segments de droite définis par leurs extrémités respectives \(\vec{u} = (u_1, u_2), \vec{v} = (v_1, v_2) \in \mathbb{R}^2\), qui s’avère être :

\[ \theta_{\vec{u},\vec{v}} = \arccos \left( \frac{u_1v_1 + u_2v_2}{\sqrt{(u_{1}^2 + v_{1}^2) \cdot (u_{2}^2 + v_{2}^2)}} \right) \]

Les deux notions de longueur d’un vecteur et d’angle entre deux vecteurs sont convenablement capturées par une seule opération sur deux vecteurs :

Definition 3 (Produit scalaire)

Soit \(V\) l’espace vectoriel standard défini par \(\mathbb{R}^2\) sur \(\mathbb{R}\). Le produit scalaire d’une paire de vecteurs \(u = (u_1, u_2)\) et \(v = (v_1,v_2) \in V\) est alors défini comme suit :

\[ \vec{u} \cdot \vec{v} = \lVert \vec{u} \rVert \lVert \vec{v} \rVert \cos \theta_{\vec{u},\vec{v}}. \]

Le produit de points possède les propriétés importantes suivantes :

  1. Pour tout \(\vec{u} \in V\), \(\lVert \vec{u} \rVert = \vec{u} \cdot \vec{u}\).

  2. Pour deux vecteurs \(\vec{u}, \vec{v} \in V\) pour lesquels \(theta_{\vec{u},\vec{v}} = \frac{\pi}{2}\), on a \(\vec{u} \cdot \vec{v} = 0\) (puisque \(\cos \frac{\pi}{2} = 0\)). De tels vecteurs sont appelés orthogonaux.

  3. Pour deux vecteurs \(\vec{u}, \vec{v} \in V\) pour lesquels \(\theta_{\vec{u},\vec{v}} = 0\), on a \(\vec{u} \cdot \vec{v} = \lVert \vec{u} \rVert \lVert \vec{v} \rVert\) (puisque \(\cos 0 = 1\)). De tels vecteurs sont appelés codirectionnels.

Plus important encore, le produit de points est linéaire dans ses deux arguments :

  1. \((u + v) \cdot w = u \cdot w + v \cdot w\),

  2. \(au \cdot v = a (u \cdot v)\),

  3. \(u \cdot (v + w) = u \cdot v + u \cdot w\),

  4. \(u \cdot av = a (u \cdot v)\),

\(u,v \in V\) sont deux vecteurs quelconques et \(a \in \mathbb{R}\) est un scalaire quelconque. Un fait remarquable qui découle de ce qui précède est que toute base \(B\) pour \(V\) composée de vecteurs de vecteurs mutuellement orthogonaux et de norme \(1\) (appelée base orthonormale ou orthonormée) nous permet d’exprimer le produit de points comme une simple somme de produits de coordonnées.

Lemma 1 (Produit scalaire via les coordonnées)

Soit \(V\) un espace vectoriel défini par \(\mathbb{R}^2\) sur \(\mathbb{R}\) et \(B = \{\vec{b_1}, \vec{b_2}\}\) une base orthonormée, c’est-à-dire :

  1. \(\lVert \vec{b_1} \rVert = \lVert \vec{b_2} \rVert = 1\),

  2. \(\vec{b_1} \cdot \vec{b_2} = 0\).

Le produit point d’une paire de vecteurs \(\vec{u} = (u_1, u_2), \vec{v} = (v_1, v_2) \in V\) (dont les coordonnées sont données dans \(B\)) est:

\[ \vec{u} \cdot \vec{v} = u_1v_1 + u_2v_2 \]

Pour démontrer ce lemme, examinons d’abord comment le produit de points agit sur une base orthonormée:

  1. \(\vec{b_1} \cdot \vec{b_1} = \vec{b_2} \cdot \vec{b_2} = 1\),

  2. \(\vec{b_1} \cdot \vec{b_2} = 0\).

Les deux points ci-dessus découlent de la définition d’une base orthonormée. Par conséquent, en utilisant la bilinéarité du produit scalaire, nous avons que pour des vecteurs arbitraires \(\vec{u} = (u_1, u_2)\) et \(\vec{v} = (v_1, v_2)\) dans \(V\) :

\[\begin{align*} \vec{u} \cdot \vec{v} &= \vec{u} \cdot (v_1 \vec{b_1} + v_2\vec{b_2}) \\ &= \vec{u} \cdot (v_1\vec{b_1}) + \vec{u} \cdot (v_2\vec{b_2}) \\ &= v_1(\vec{u} \cdot \vec{b_1}) + v_2 (\vec{u} \cdot \vec{b_2}) \\ &= v_1\left((u_1\vec{b_1} + u_2\vec{b_2}) \cdot \vec{b_1}\right) + v_2\left((u_1\vec{b_1} + u_2\vec{b_2}) \cdot \vec{b_2}\right) \\ &= v_1\left(u_1\vec{b_1} \cdot \vec{b_1} + u_2\vec{b_2}\vec{b_1} \right) + v_2\left(u_1\vec{b_1} \cdot \vec{b_2} + u_2\vec{b_2}\vec{b_2} \right) \\ &= v_1u_1 + v_2u_2 = u_1v_1 + u_2v_2 \end{align*}\]

Enfin, nous notons que la base standard \(B = \{\vec{i},\vec{j}\}\) donnée par \(\vec{i} = (1,0), \vec{j}= (0,1)\) est orthonormée, de sorte que la formule ci-dessus s’applique à l’espace vectoriel standard \(\mathbb{R}^2\).

L’applet suivante montre comment le produit de point change en fonction des deux vecteurs :

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Transformations linéaires et leurs matrices#

Etant donné deux espaces vectoriels \(V, W\), on peut considérer l’ensemble des fonctions \(f : V \rightarrow W\) qui transforment les vecteurs de \(V\) en vecteurs de \(W\) et respectent les opérations de multiplication scalaire et l’addition vectorielle :

Definition 4 (Linear map)

Une transformation linéaire est une fonction \(f : V \rightarrow W\) telle que pour tout vecteur \(\vec{v}, \vec{u} \in V\) et tout \(c \in \mathbb{R}\):

  1. \(f(\vec{v} + \vec{u}) = f(\vec{v}) + f(\vec{u})\),

  2. \(f(c\vec{v}) = cf(\vec{v})\).

Les axiomes des espaces vectoriels impliquent alors que les cartes linéaires conservent les combinaisons linéaires :

(11)#\[f(c_1\vec{v_1} + c_2\vec{v_1}) = c_1f(\vec{v_1}) + c_2f(\vec{v_2}).\]

Puisque, comme nous l’avons déjà mentionné, chaque vecteur peut être écrit comme une combinaison deux vecteurs de base de \(\mathbb{R}^2\), pour comprendre une transformation linéaire, il suffit de comprendre son effet sur les vecteurs de base \(\vec{i}, \vec{j}\). En effet, en écrivant le résultat de l’application de \(f\) sur les vecteurs de base nous avons:

(12)#\[\begin{align} f(\vec{i}) &= c_{1,1}\vec{i} + c_{2,1}\vec{j},\\ f(\vec{j}) &= c_{1,2}\vec{i} + c_{2,2}\vec{j}. \end{align}\]

Ces quatre coefficients \(c_{1,1}, c_{1,2}, c_{2,1}, c_{2,2}\) déterminent totalement la transformation \(f\) !

Il est pratique de rassembler ces coefficients dans un objet appelé la matrice de la transformation \(f\) :

\[\begin{split}M_f= \begin{pmatrix} c_{1,1} & c_{1,2}\\ c_{2,1} & c_{2,2} \end{pmatrix}\end{split}\]

Prenons un exemple simple, la transformation \(R\) qui envoie \(\vec{i}\) à \(\vec{j}\) et \(\vec{j}\) à \(\vec{i}\):

(13)#\[\begin{align} R(\vec{i}) &= \vec{j} = 0\vec{i} + 1\vec{j},\\ R(\vec{j}) &= \vec{i} = 1\vec{i} + 0\vec{j}. \end{align}\]

On a donc \(c_{1,1} = 0, c_{1,2} = 1, c_{2,1} = 1, c_{2,2} = 0\) et la matrice de \(R\) est :

\[\begin{split}M_R= \begin{pmatrix} 0 & 1\\ 1 & 0 \end{pmatrix}\end{split}\]

Quel est le résultat de \(f\) appliqué à un vecteur arbitraire, disons \(\vec{v} = \begin{pmatrix} \sqrt{2} \\ \pi \end{pmatrix}\) ? En utilisant la décomposition de \(\vec{v}\) en vecteurs de base, nous calculons :

(14)#\[\begin{split}f(\vec{v}) = f(\sqrt{2}~\vec{i} + \pi \vec{j}) = \sqrt{2}f(\vec{i}) + \pi f(\vec{j}) = \sqrt{2}~\vec{j} + \pi \vec{i} = \begin{pmatrix} \pi \\ \sqrt{2} \end{pmatrix}\end{split}\]

Il existe un moyen plus simple d’effectuer ce calcul : la multiplication matrice-vecteur !

\[\begin{split}\begin{pmatrix} c_{1,1} & c_{1,2}\\ c_{2,1} & c_{2,2} \end{pmatrix} \begin{pmatrix} v_1 \\ v_2 \end{pmatrix} = \begin{pmatrix} c_{1,1} v_1 + c_{1,2} v_2 \\ c_{2,1} v_1 + c_{2,2} v_2 \end{pmatrix} \end{split}\]

En utilisant cette méthode, nous pouvons facilement calculer \(R(\begin{smallmatrix} \sqrt{2}\\ \pi \end{smallmatrix})\):

\[\begin{split}\begin{pmatrix} 1 & 0\\ 0 & 1 \end{pmatrix} \begin{pmatrix} \sqrt{2}\\ \pi \end{pmatrix} = \begin{pmatrix} 0 \cdot \sqrt{2} + 1 \cdot \pi \\ 1 \cdot \sqrt{2} + 0 \cdot \pi \end{pmatrix} = \begin{pmatrix} \pi \\ \sqrt{2} \end{pmatrix}\end{split}\]

Géométriquement, le résultat de l’application de \(R\) est une réflexion :

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Le reste de cette section est consacré à la présentation de classes importantes de transformations linéaires et de leurs matrices: la mise à l’échelle, les transformations euclidiennes de rotations et les réflexions, et les projections.

Mise à l’échelle#

Comme nous l’avons déjà mentionné, la mise à l’échelle d’un vecteur individuel \(\vec{v}\) par un facteur \(a \in \mathbb{R}\) est réalisée par la multiplication scalaire \(a\vec{v}\).

En appliquant cette transformation aux vecteurs de base, on trouve :

(15)#\[\begin{align} S_a(\vec{i}) &= a\vec{i} = a\vec{i} + 0\vec{j},\\ S_a(\vec{j}) &= a\vec{j} = 0\vec{i} + a\vec{j}. \end{align}\]

La matrice correspondante est donc:

\[\begin{split}M = \begin{pmatrix} a & 0\\ 0 & a \end{pmatrix}\end{split}\]

et ses effets sur différents vecteurs peuvent être visualisés dans la figure suivante :

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Rotations et réflexions#

Les rotations sont plus faciles à analyser si l’on adopte un autre système de coordonnées : les coordonnées polaires. Au lieu de décrire les points par des paires \((x,y)\) de distances le long des deux axes, nous les décrivons par des paires \((r, \phi)\) d’un angle \(\phi \in (-\pi,\pi]\) par rapport à l’axe \(x\) et d’un rayon \(r\). Les deux systèmes de coordonnées \((x,y)\) et \((r,\phi)\) sont liés par :

(16)#\[\begin{align} x &= r \cos\phi,\\ y &= r \sin\phi, \end{align}\]

comme démontré ici :

../_images/Polar_to_cartesian.svg

Les rotations sont faciles à effectuer en coordonnées polaires : la rotation d’un point \(p = (r, \phi)\) avec un angle de \(\theta\) degrés donne le point \(p' = (r, \phi + \theta)\) :

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Examinons maintenant comment une opération de rotation \(R_{\theta}\) affecte les deux vecteurs de base \(\vec{i}, \vec{j}\). Tout d’abord, convertissons leurs coordonnées cartésiennes en coordonnées polaires :

(17)#\[\begin{align} (1,0) &\rightarrow (1,0),\\ (0,1) &\rightarrow \left(1,\frac{\pi}{2}\right). \end{align}\]

La rotation d’un angle \(\theta\) donne alors :

(18)#\[\begin{align} (1,0) &\rightarrow (1,\theta), \\ \left(1,\frac{\pi}{2}\right) &\rightarrow \left(1,\frac{\pi}{2}+\theta \right). \end{align}\]

En reconvertissant aux coordonnées cartésiennes, nous avons donc :

(19)#\[\begin{align} (1,0) &\rightarrow \left( \cos\theta,\sin\theta \right), \\ (0,1) &\rightarrow \left(\cos \left(\frac{\pi}{2} + \theta\right), \sin \left(\frac{\pi}{2} + \theta\right)\right). \end{align}\]

En utilisant les identités trigonométriques \(\cos \left(\frac{\pi}{2} + \theta \right) = -\sin\theta\) et \(\sin \left(\frac{\pi}{2} + \theta \right) = \cos\theta\) nous avons finalement :

(20)#\[\begin{align} R_{\theta} \vec{i} &= (\cos\theta, \sin\theta) = \cos\theta \vec{i} + \sin\theta \vec{j},\\ R_{\theta} \vec{j} &= (-\sin\theta,\cos\theta) = -\sin\theta\vec{j} + \cos\theta\vec{j} \end{align}\]

La matrice correspondante est donc:

\[\begin{split}R_{\theta} = \begin{pmatrix} \cos \theta & \sin\theta \\ -\sin\theta & \cos\theta \end{pmatrix}\end{split}\]

Son effet sur notre exemple de vecteurs est le suivant :

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Plus sur les bases#

Jusqu’à présent, nous avons travaillé avec la base \(B\) donnée par l’ensemble \(\{\vec{i},\vec{j}\}\) des vecteurs \((1,0)\) et \((0,1)\) en coordonnées cartésiennes. Un fait important de l’algèbre linéaire est l’existence d’autres bases, infiniment nombreuses en fait !

Pour énoncer le fait ci-dessus plus précisément, nous devrons utiliser la notion suivante de indépendance linéaire:

Definition 5 (Indépendance linéaire)

Soit \(S = \{\vec{v_1},\dots,\vec{v_n}\}\) un ensemble de vecteurs de cardinalité \(\lvert S \rvert = n \in \mathbb{N}\). Alors \(S\) est linéairement indépendant s’il existe \(a_1, \dots, a_n \in \mathbb{R} \setminus \{0\}\) tel que :

\[a_1 \vec{v_1} + \dots + a_n \vec{v_n} = \vec{0}.\]

Exercice : Si \(\vec{u},\vec{v}\) sont linéairement indépendants, que pouvez-vous dire de \(\frac{\vec{u} \cdot \vec{v}}{\lVert u \rVert \lVert v \rVert}\) ?

L’énoncé précis du fait ci-dessus est alors :

Lemma 2

Soit \(S = \{\vec{v_1},\vec{v_2}\}\) un ensemble de vecteurs de cardinalité 2. Alors \(S\) est une base si et seulement si c’est une collection de vecteurs linéairement indépendants.

Cela revient à dire que \(\vec{v_1}\) et \(\vec{v_2}\) ne sont pas situés sur la même droite.

Changement de base#

Supposons que nous voulions faire pivoter le vecteur

(22)#\[\begin{split}\vec{u} = \begin{pmatrix} \frac{4+\pi}{4\sqrt{2}-\pi} \\ \frac{-2-2\sqrt{2}}{-4\sqrt{2}+\pi} \end{pmatrix}\end{split}\]

de \(\pi/4\) radians (dans le sens antihoraire). Nous pourrions, bien sûr, appliquer la matrice de la rotation respective à ce vecteur pour obtenir le résultat souhaité, mais nous nous apercevons rapidement qu’il est assez fastidieux de faire les calculs à la main étant donné la complexité des coefficients de \(u\).

Cependant, si nous affectons le changement de variables suivant sur les coordonnées \((x,y)\) de \(u\), nous observons que cela simplifie sa forme :

\[\begin{split}\begin{align*} x' &= \sqrt{2}x - \frac{\pi y}{2}\\ y' &= -x + 2y \end{align*}\end{split}\]

Un tel changement de variables correspond à un changement de base : une nouvelle façon d’exprimer les vecteurs comme la somme de deux vecteurs de base différents de notre base cartésienne canonique initiale \(B = \{\vec{i},\vec{j}\}\).

Voici une visualisation du changement de base:

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Essayez de répondre aux questions suivantes :

  • Ce changement de base est-il une transformation linéaire ? Si oui, calculez sa matrice.

  • Comment passer de la base \(S'\) à la base \(S\) ? Ce changement est-il une transformation linéaire ? Si oui, calculez sa matrice.

  • En utilisant ce changement de base, pouvez-vous simplifier le calcul de la rotation de \(\vec{u}\) mentionnée ci-dessus ?

  • Supposons qu’une transformation \(f\) soit décrite par une matrice \(M_f\) dans la base \(S\). Quelle est la matrice correspondante pour \(f\) dans la nouvelle base \(M_{f'}\) ?

Exercices#

Exercice 1#

Soient \(\vec{u} = \begin{pmatrix} 1 \\ -1 \end{pmatrix}\) et \(\vec{v} = \begin{pmatrix} \frac{\sqrt{2}}{2} \\ \frac{\sqrt{2}}{2} \end{pmatrix}\) deux vecteurs de l’dans l’espace vectoriel euclidien \(\mathbb{R}^2\). Calculer ce qui suit :

  1. La somme \(\vec{u}+ \vec{v}\).

  2. Les vecteurs \(-\vec{u}, -\vec{v}\).

  3. Les vecteurs \(a\vec{u}, a\vec{v}\) pour \(a = \frac{\sqrt{2}}{3}\).

  4. Les normes \(\lVert u \rVert, \lVert v \rVert\) de \(\vec{u}\) et \(\vec{v}\).

  5. La norme \(\lVert \vec{u} + \vec{v} \rVert\) de \(\vec{u}+\vec{v}\).

  6. L’angle (en radians) entre les deux vecteurs \(\vec{u},\vec{v}\).

  7. L’angle (en radians) entre les deux vecteurs \(a\vec{u},a\vec{v}\).

Exercice 2#

Calculer les matrices des opérations suivantes :

  1. Remise à l’échelle par \(a = -5\).

  2. Rotation de \(0\) radians.

  3. Rotation de \(\pi/2\) radians.

  4. Rotation de \(\pi\) radians.

  5. Rotation de \(3\pi/2\) radians.

  6. Rotation de \(2\pi\) radians.

  7. Rotation de \(3\pi\) radians.

  8. Rotation de \(4\pi\) radians.

  9. Réflexion par rapport à l’axe horizontal.

  10. Réflexion par rapport à l’axe vertical.

  11. Réflexion par rapport à la droite \(y = x/3\).

Exercice 3#

Appliquez les matrices calculées ci-dessus aux vecteurs :

  1. \(\vec{u_1} = \begin{pmatrix} 1 \\ 0 \end{pmatrix}\).

  2. \(\vec{u_2} = \begin{pmatrix} 0 \\ 1 \end{pmatrix}\).

  3. \(\vec{u_3} = \begin{pmatrix} 1 \\ -1 \end{pmatrix}\).

  4. \(\vec{u_4} = \begin{pmatrix} -5 \\ -2\pi \end{pmatrix}\).

Exercice 4#

Soit \(p_1 = (1,0)\) et \(p_2 = (2,0)\) deux points du plan \(\mathbb{R}^2\). Calculez le résultat de la rotation de \(p_1\) d’un angle de \(\pi/2\), où le centre de rotation est \(p_2\), comme le montre la figure ci-dessous.

../_images/rotate_exo.svg

Indice : considérez une transformation des coordonnées qui place la configuration des points \(p_1, p_2\) à l’origine.